Pause imminente

Le printemps est arrivé, et avec lui m'est venue l'envie de focaliser mon attention sur d'autres choses que l'écriture de ce blog pendant quelque temps. Je pense bien y revenir de façon dédiée quand le moment paraîtra bon, mais j'entends pour l'instant l'appel d'intérêts longuement négligés.

 

Ce n'est certainement pas faute de titres sur lesquels écrire. Chaque semaine, voire chaque jour, paraissent des nouveaux essais plus intrigants, amusants, émouvants ou surprenants les uns que les autres. Le médium ludique se porte extrêmement bien (surtout dans la sphère indépendante), prend des formes toujours plus diverses et ne montre aucun signe de ralentissement.

 

C'est pourquoi je ne couperai pas la communication frette sec d'un seul coup. Au cours de la semaine, je publierai trois billets de comptes-rendus rapides qui couvriront la plupart des titres sur lesquels j'aurais autrement passé tout droit. Ajoutés à tous ceux que j'ai abordés depuis janvier, ils ne font que renforcer mon sentiment qu'il n'y a peut-être bien jamais eu de meilleur moment pour être ou devenir ludophile que maintenant.

Sluggish Morss

Sluggish Morss est peut-être l'histoire d'une mort. C'est peut-être la saga d'une addiction ou d'une illumination. Il s'agit peut-être d'un cauchemar, d'un aller simple vers l'infini, ou simplement d'une tranche de science-fiction à l'inspiration particulièrement originale. Chose certaine, il s'agit de l'un des ouvrages interactifs indépendants les plus stimulants des derniers mois, propulsant les sens et l'esprit dans un univers de parasites, d'hybrides bizarres et de vagues échos de la vie sur Terre.
 

Ni no Kuni

 

Paru en janvier après une longue attente, Ni no Kuni: Wrath of the White Witch est à la fois l'une des plus belles choses à s'être produites dans le médium ludique au cours des dernières années, et l'un de ses exercices les plus laborieux. C'est une grande aventure transcendant régulièrement son format, en même temps qu'un rappel constant des limites indélébiles du jeu de rôle de variété japonaise. Il s'agit, disons-le franchement, d'un méchant bordel, enchanteur et boursouflé à parts égales, sur lequel il est difficile d'avoir une opinion arrêtée.

 

Actual Sunlight / Depression Quest

Pour une rare fois dans l'écriture de ce blog, je me retrouve incapable de décider d'une ouverture appropriée à ce que je désire aborder. La raison de ce blocage est que les objets concernés explorent un sujet qui m'est tellement proche, de manières m'inspirant un tel respect, que rien ne me semble suffisamment apte pour les introduire.
 

Actual Sunlight est un récit interactif racontant de façon presque entièrement linéaire la descente d'un homme plus si jeune aux plus profondes abîmes de l'amertume. Plus flexible dans ce qu'il raconte, Depression Quest est une fiction à visées instructives dépeignant les hauts et les bas d'un homme luttant contre la détresse au meilleur de ses capacités. Parus sur le Web la même semaine, tous deux sont des exercices littéraires bien avant d'être "ludiques" d'une quelconque façon, mais la part de malléabilité qu'ils comportent procure à leurs sidérants portraits une intimité dont tout autre médium serait fondamentalement incapable.
 

SuperSight

 

Sous des dehors naïfs et conservateurs, SuperSight s'avère une proposition d'une richesse surprenante. Conçu dans le cadre d'une initiative d'aide à la motivation du nom de SuperMe, ce jeu d'arcade d'une suprême compétence impressionne par la cohérence entre son expérience ludique et ses visées explicites de soutien psychologique.
 

Antichamber

 

D'emblée, Antichamber se présente comme un objet tout bonnement spectaculaire. Concepteur-philosophe se réclamant d'une autorité artistique totale, Alexander Bruce a méticuleusement édifié un réseau d'espaces et d'énigmes défiant toute forme d'entendement et poussant l'architecture virtuelle aux limites du concevable. De manière continuellement inspirée, chacune des situations qu'il présente est associée à une pensée exposant une facette du raisonnement humain, débouchant sur de surprenantes transpositions ludiques de petites vérités cognitives souvent prises pour acquises. Le jeu semble ainsi tout avoir pour constituer un moment fort du jeu indépendant, une grande célébration de nos facultés de résolution de problèmes, établissant Bruce comme nouvel auteur essentiel.

 

Roar Rampage

 

Dès sa première apparition comme jeu gratuit pour navigateurs Web, Roar Rampage semblait taillé sur mesure pour une interface à écran tactile ; et comme de fait, les Italiens de Neutronized annoncèrent la mise en chantier d'une adaptation iOS quelques six mois après la sortie initiale. Parue début février, ladite version mobile réalise amplement ce potentiel et enrichit le jeu d'un mode "sans fin" parfaitement approprié à la plateforme.

 

Art Game

 

Disponible depuis quelques semaines, Art Game est l'une des plus belles démonstrations à ce jour du talent de Pippin Barr, docteur en philosophie et développeur indépendant. Au moins autant penseur que concepteur de jeux, l'homme roule sa bosse ludique depuis le début 2011, déposant des jeux gratuits sur le Web à chaque poignée de mois et détaillant son processus dans un blog d'une franchise passionnante.

 

Proteus

 

Les mots me manquent pour exprimer toutes les manières dont je crois que Proteus est une oeuvre monumentale. Poème électronique, symphonie kinesthésique, hommage sublime à la beauté du monde sous forme de balade impressionniste ; tous ces descriptifs seraient justes, mais resteraient insuffisants pour englober la puissance de l'anomalie qu'il représente. Amplement discuté (et souvent contesté) parmi les cercles d'amateurs au cours des dernières semaines, Proteus est un objet qui transcende le verbe et ravage les définitions, à commencer par l'idée même de "jeu vidéo".

 

Wave Trip

 

S'il m'arrivait de douter que les jeux tactiles pour appareils mobiles constituent l'un des espaces de design les plus intéressants du moment, Wave Trip est le genre d'objet qui me remettrait les idées à la bonne place. Non pas qu'il s'agisse d'un chef-d'oeuvre de quelconque magnitude, mais bien qu'il représente une intention esthétique à la fois originale et parfaitement appropriée à sa plateforme de distribution, en plus d'être fort bien réalisé sur le plan technique.

 

Dream of the Blood Moon

 

Faute d'avoir un ordinateur capable de le faire opérer correctement, je n'ai pas encore eu la chance d'essayer Slender, le jeu d'horreur indépendant qui a fait fureur l'année dernière pour la terrifiante simplicité de sa prémisse. J'ai cependant réussi à me perdre dans Dream of the Blood Moon, qui récupère sensiblement le même modèle, mais s'en éloigne notamment par une jouabilité plus touffue et une exploitation particulièrement remarquable du moteur Unreal.

 

The Cave

 

Dans l'anticipation des premiers mois de la nouvelle année, il y avait peut-être deux jeux que j'attendais autant que The Cave. Pour tout dire, il suffit que le studio Double Fine annonce un nouveau titre pour que je perde un peu les pédales et prévoie d'y accorder une bonne semaine. Et ultimement, cet enthousiasme aura été assez justifié. Imaginé par le père de Monkey Island, The Cave n'est pas le chef-d'oeuvre que certains auraient voulu qu'il soit, mais reste une production très intéressante qui emporte la compagnie de Tim Schafer dans une direction rafraîchissante.

Time Surfer

 

Rapide, ardu et coloré, Time Surfer est un jeu d'arcade qui ne laisse pas sa place. Plus que légèrement inspiré par Tiny Wings, il parvient à reproduire la dynamique fondamentale de ce classique, mais surtout à y incorporer assez de variantes pour se forger une identité merveilleusement distincte.

 

Westerado

 

Le site de la chaîne télé Adult Swim s'est doté avec les années d'un catalogue de jeux Web des plus impressionnants. On y trouve entre nombreux titres des classiques comme Robot Unicorn Attack et Burrito Bison, mais aussi des petites perles obscures telles que Pipedreamz et (surtout) Lesbian Spider-Queens of Mars. Leur dernier ajout, Westerado des Néerlandais Ostrich Banditos, fait honneur à la réputation du site en étant à la fois rétro, facile d'utilisation et drôlement original.

 

DmC (Devil May Cry)

 

Jouer au nouveau Devil May Cry, c'est revenir à l'adolescence d'un médium artistique commençant tranquillement à s'en extraire ; c'est également replonger dans sa propre phase ingrate, et se familiariser avec ce qui est considéré apte à faire tripper la jeunesse d'aujourd'hui. C'est revenir à un état de béatitude confortable où aucune recherche n'a vraiment besoin d'avoir lieu, si ce n'est du maintien d'un look dans le vent et du regard admiratif des pairs. Stimulant et bien produit, DmC est un objet provoquant une ivresse aussi agréable que profondément hermétique, d'un conservatisme qui n'a malheureusement rien d'étonnant.

 

Joe Danger Touch

 

Mine de rien, les quatre sympathiques Anglais de Hello Games forcent l'admiration. En trois petites années, ils ont mis au monde en Joe Danger une dynamique et un environnement de jeu inoubliables, échappé au piège de l'exclusivité Sony, puis approfondi sans trop l'encombrer ladite propriété dans une seconde mouture fort réussie. Ils ont aussi tenté récemment le passage au support mobile, dans ce qui s'avère peut-être leur plus belle offrande à ce jour.

 

Karateka

  

Karateka, sorti en douce il y a quelque temps et à peine commenté par la critique, a été une de mes belles surprises de fin d'année. Refonte conceptuelle du classique de 1984, il comporte le genre de clarté de vision et d'unité d'ensemble pour lesquelles j'ai une appréciation particulière, soutenu par une plastique merveilleusement bien réalisée.

 

Kentucky Route Zero

 

Kentucky Route Zero est exactement le genre d'objet auquel je pense quand je parle du potentiel créatif infini du design de jeux informatiques. Pas qu'il réponde à des critères précis permettant de lui coller une étiquette bien commode, du tout ; c'est un jeu qui fait sa propre affaire et parle de ce que bon lui semble, fièrement et dans le style qui lui sied. Il s'agit d'un jeu "indépendant" au sens le plus propre du terme, comme il s'en trouve de plus en plus au fil des ans, et à l'égard desquels il semble y avoir de plus en plus de sympathie.

 

Anarchy Reigns

 

Anarchy Reigns est rempli à ras bord de choses qu'on aurait peu de chances de rencontrer ailleurs que dans un jeu vidéo d'action japonais. Des hommes bâtis comme des 4 X 4. Des femmes aux seins plus gros que la tête. Plus d'explosions, d'éclats de lumière et de prises de lutte impossibles qu'il n'est possible de compter. Mais au travers de ces drôles d'attributs, j'ai trouvé mon expérience compétitive en ligne la plus enlevante depuis mon séjour dans le monde de Brink. Après les excellents mais obstinément solo Vanquish et Bayonetta, c'était la meilleure suite envisageable pour le studio Platinum Games.

 

Hundreds

Bien qu'un peu limitée dans son offre, Hundreds est une belle petite patente. Co-conçue par deux génies incontestables du développement de jeux pour appareils mobiles, Adam Saltsman (Canabalt, Gravity Hook) et Greg Wohlwend (Solipskier, Puzzlejuice), l'application iOS tire un étonnant millage d'une idée assez simple: faire grossir des cercles jusqu'à ce que les chiffres correspondant à leurs tailles totalisent un nombre de cent. Les variations exercées sur le concept surprennent souvent - aucun des cent tableaux ne répète exactement la même formule -, mais l'ensemble est diminué par le fait que les vignettes sont oubliées aussitôt complétées, ne procurant aucune raison d'y revenir pour en explorer les nuances.
 

De retour !

La page de 2012 est maintenant tournée, la nouvelle année s'annonçant des plus positives. Durant le temps des Fêtes, j'ai demandé à ma copine de m'épouser (et elle a dit oui). Après un mois de chômage ingrat, je commence bientôt un nouvel emploi qui proposera de nouveaux défis. Bref, les circonstances me semblent favorables pour tenter de se remettre à l'écriture - ici et ailleurs -, moyennant bien sûr quelques ajustements.