Monday, September 17, 2012

Home


S'il y a une personne et une chose contre lesquelles Benjamin Rivers, concepteur de Home, doit être en beau fusil, c'est bien Jasper Byrne et son Lone Survivor. Sorti quelques mois auparavant, l'excellent jeu d'horreur en 2D a fait jaser pour la stupéfiante efficacité de son style visuel rudimentaire... faisant du coup paraître Rivers comme un vulgaire imitateur. Pourtant, les deux jeux poursuivent des objectifs on ne pourrait plus distincts, et leurs différences sont facinantes à considérer. Home est également court, peu dispendieux, et maintenant disponible sur Steam après quelques mois de distribution autonome. Pourquoi ne pas l'essayer?


Ce qui est intéressant du type d'horreur proposé par Home, c'est que le surnaturel en est complètement absent... à moins, bien sûr, de vouloir en imaginer quelque part. L'angoisse, tel que suggéré par son titre, y est domestique et à peine spectaculaire, se présentant de façon étonnamment crédible et terre à terre. Le jeu consiste à rapiécer une trame meurtrière dans l'esprit d'un homme à la conscience pour le moins engourdie, et l'auteur se montre à cet égard beaucoup plus intéressé à relayer un état d'âme qu'à éclairer la vérité des événements. Il est donc possible d'arriver au bout du parcours et de rester confus sur les faits, mais d'arriver quand même à des semblants de conclusions qui se tiennent; les nombreuses interprétations relatées par les joueurs sur le site du développeur, toutes plus valides les unes que les autres, témoignent du succès de cet exercice risqué.

Dans l'optique de cette emphase sur le récit, la simplicité semble avoir été au centre du design d'interface; malgré ses allures de "point-and-click" assez traditionnel, le jeu ne comporte aucune manipulation d'inventaire, aucun affrontement, aucun choix à faire au-delà de l'occasionnel "oui ou non". Un dépouillement qui, lors des passages plus morts d'un ensemble qui ne s'agite jamais vraiment, flirte dangereusement avec l'ennui. Cela dit, la morosité plus ou moins enlevante s'avère partie intégrante de l'atmosphère conjurée par Rivers, tandis que le son, le texte et le détail visuel évoquent remarquablement bien les ambiances, les textures et même les odeurs des lieux traversés. D'une noirceur et d'une vraisemblance rares, Home est aussi d'une franche humanité, et défend admirablement sa place parmi la présente vague de jeux d'horreur indépendants.

Verdict: RECOMMANDÉ, pour une expérience narrative fluide et habilement angoissante, contournant le vocabulaire habituel des jeux d'horreur pour imposer sa propre voix.

No comments:

Post a Comment