Wednesday, March 13, 2013

Ni no Kuni

 
Paru en janvier après une longue attente, Ni no Kuni: Wrath of the White Witch est à la fois l'une des plus belles choses à s'être produites dans le médium ludique au cours des dernières années, et l'un de ses exercices les plus laborieux. C'est une grande aventure transcendant régulièrement son format, en même temps qu'un rappel constant des limites indélébiles du jeu de rôle de variété japonaise. Il s'agit, disons-le franchement, d'un méchant bordel, enchanteur et boursouflé à parts égales, sur lequel il est difficile d'avoir une opinion arrêtée.
 
D'une part, Ni no Kuni est une collection d'histoires simples, sympathiques et souvent touchantes, situées dans un monde à la beauté plastique non seulement impressionnante, mais imbue d'un souffle féérique plus grand que nature. Carburant aux émotions positives, il ne fait aucun doute que le jeu a le coeur à la bonne place et véhicule des valeurs tout ce qu'il y a de plus nobles. L'attention portée aux moindres détails de la direction artistique ne fait donc jamais de doute, tout comme la sincérité de la majeure partie des événements narratifs ; c'est l'abondance pure et simple du contenu ainsi que la fréquente platitude de sa livraison qui, à la longue, rendent un peu aveugle à sa valeur.

D'une autre part, il s'agit d'un jeu comportant un assortiment de systèmes ludiques assez estomaquant. Collecte et entraînement de créatures, gestion d'équipement et d'habiletés, mélange d'ingrédients, chasse aux objets précieux, jeux d'argent... À peu près tout ce qui a déjà figuré dans un jeu de rôle japonais est présent sous une forme ou une autre, sans souci particulier de son utilité dans l'ensemble. L'abondance de couches mécaniques a de quoi passionner, mais résulte en une quantité de variables si nombreuse qu'aucune d'entre elles n'apparaît particulièrement cruciale. Tout est remplaçable dans Ni no Kuni, et presque rien n'est essentiel ; reste à endurer, heure après heure, la répétition perpétuelle d'une poignée d'actions robotiques, ce qui s'avère assez délicat pour un joueur adulte en 2013.
 
Ces deux faces se font la lutte tout au long de la durée colossale de l'aventure, souvent étirée de manière assez grossière, et ce déséquilibre fondamental obscurcit la plus grande inspiration du projet, à savoir d'effectuer un retour aux sources non seulement du "JRPG", mais de la fiction pour enfants dans ce qu'elle a de plus enrichissante, rêveuse et réparatrice. Un ouvrage mémorable et rafraîchissant de naïveté se terre quelque part au sein de Ni no Kuni, et laisse poindre à l'occasion le bout de son nez ; il est simplement dommage que tant de débroussaillage et -- surtout -- de patience soient nécessaires pour en témoigner.

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